Dans une sortie médiatique aussi rare que virulente, Ganiou Soglo, ancien ministre et figure de l’opposition au régime de Patrice Talon, s’en est pris à ce qu’il considère comme une instrumentalisation de son père, l’ancien président Nicéphore Soglo, premier dirigeant démocratiquement élu du Bénin en 1991. Dans un communiqué, Ganiou Soglo dénonce la diffusion répétée, ces dernières semaines, d’images montrant son père, aujourd’hui âgé de 94 ans, faisant l’éloge des réalisations du président Talon. Une démarche qu’il qualifie de « manipulation » et d’« abus de faiblesse caractérisé », mettant en cause à la fois des journalistes et les autorités actuelles.

Pour Ganiou Soglo, ces images ne reflètent pas une expression libre et consciente de son père. Selon lui, l’état de santé déclinant de l’ancien président, dû à son âge avancé, le rend vulnérable et incapable de juger pleinement de ce qui est bon ou mauvais. En affirmant que Nicéphore Soglo n’est plus en mesure de s’exprimer librement, Ganiou semble chercher à décrédibiliser les récentes prises de position de son père, notamment celles qui paraissent favorables au régime en place. Cette posture soulève des questions : l’ancien ministre tente-t-il de protéger l’héritage politique de son père, ou cherche-t-il à contrôler le narratif autour de la figure emblématique qu’il représente ?
Ganiou Soglo pointe du doigt deux journalistes qui, selon lui, accompagnent régulièrement son père et orchestreraient cette « mise en scène médiatique ». Il les accuse d’exploiter la notoriété et la fragilité de l’ancien président pour servir des intérêts politiques, notamment ceux du président Patrice Talon. Ces allégations s’accompagnent de menaces explicites : Ganiou Soglo avertit que toute nouvelle tentative d’instrumentalisation de son père sera considérée comme un « acte malveillant » et entraînera des conséquences. Cette mise en garde vise non seulement les journalistes incriminés, mais aussi leurs éventuels commanditaires, ainsi que toute personne ou autorité impliquée dans de telles pratiques.
Une critique implicite de l’appréciation des actions du pouvoir

En filigrane, cette sortie médiatique révèle une certaine conception de l’opposition politique selon Ganiou Soglo. En tant qu’adepte de la résurrection de la Renaissance du Bénin (RB), parti historique fondé par ses parents, il semble estimer qu’un opposant ne devrait pas reconnaître publiquement les mérites du pouvoir en place. Ainsi, les éloges prêtés à Nicéphore Soglo envers les réalisations de Patrice Talon sont perçus comme une forme de trahison ou de compromission, incompatibles avec l’image d’un opposant intransigeant. Cette position pourrait refléter une volonté de préserver l’héritage de la RB, mais elle risque également de polariser davantage le débat politique. Ce genre de perception reflète plutôt une aigreur plus qu’un besoin d’avancement du pays.
Cette prise de parole de Ganiou Soglo, bien que motivée par une volonté affichée de protéger son père, soulève des interrogations sur ses intentions politiques. En dénonçant une prétendue manipulation, il cherche à réaffirmer son contrôle sur l’héritage familial et politique des Soglo, tout en consolidant sa position dans l’opposition. Cependant, en menaçant directement des journalistes et en critiquant toute forme de reconnaissance des actions du pouvoir, Ganiou Soglo court vers une certaine radicalisation politique, dans un contexte politique béninois déjà tendu. L’homme ne veut rien voir d’autre que le mauvais en ce régime qui, malgré d’éventuels tares, a réalisé de grandes choses.
M.D