Lors de sa rencontre avec les jeunes le lundi 28 juillet 2025, le président béninois Patrice Talon a déclaré : « Le candidat que je vais promouvoir peut venir des Démocrates, du Bloc Républicain, de l’Union Progressiste le Renouveau ou de nulle part. Ce qui compte, c’est la compétence. » Cette prise de position, à première vue inclusive, laisse supputer sur les intentions et les implications dans le contexte politique béninois.
Le Bénin traverse une période de polarisation politique marquée par des tensions entre le pouvoir et l’opposition, notamment Les Démocrates, qui représentent une force significative. En mentionnant explicitement ce parti aux côtés des formations pro-gouvernementales comme le Bloc Républicain et l’Union Progressiste le Renouveau, Talon semble tendre la main à l’opposition. Cette ouverture pourrait être interprétée comme une tentative de désamorcer les critiques d’exclusion politique, souvent formulées à l’encontre de son administration. En insistant sur la « compétence » comme critère principal, il projette une image de pragmatisme, cherchant à dépasser les clivages partisans pour fédérer autour d’un projet national.
Une stratégie électorale en vue de 2026 ?
À l’approche de l’élection présidentielle de 2026, où Talon ne pourra pas se représenter en raison de la limitation constitutionnelle des mandats, cette déclaration pourrait aussi refléter une stratégie électorale. En se positionnant comme un leader au-dessus des partis, Talon cherche peut-être à consolider son influence sur la désignation de son successeur.
En n’excluant aucun parti, y compris l’opposition, il pourrait viser à élargir son audience et à rallier des figures de différents horizons sous une bannière commune, tout en marginalisant les voix les plus critiques. L’accent mis sur la « compétence » pourrait également servir à légitimer un candidat de son choix, même s’il n’est pas issu des rangs traditionnels de ses alliés.
Une réponse aux attentes de la jeunesse ?
La déclaration s’adresse directement aux jeunes, un groupe démographique clé au Bénin. En valorisant la compétence et en ouvrant la porte à des candidatures « de nulle part », Talon pourrait chercher à capter l’aspiration des nouvelles générations à un renouvellement de la classe politique. Cette rhétorique peut séduire une jeunesse souvent frustrée par les élites établies, tout en détournant l’attention des critiques sur les restrictions des libertés politiques ou les défis économiques.
Une ambiguïté calculée ?
Cependant, l’absence de détails sur ce que Talon entend par « compétence » laisse place à des interrogations. Ce critère, bien que séduisant, reste vague et pourrait être instrumentalisé pour justifier des choix politiques opportunistes. De plus, en incluant des partis d’opposition tout en gardant un contrôle étroit sur le système politique, Talon pourrait chercher à donner une illusion d’ouverture sans réellement céder de terrain. Cette ambiguïté pourrait également refléter une volonté de garder toutes les options ouvertes, y compris celle de soutenir un outsider pour surprendre ses adversaires.
La déclaration de Patrice Talon, bien que brève, est lourde de sous-entendus. Elle peut être vue comme une tentative d’apaisement, une stratégie électorale, une réponse aux attentes de la jeunesse ou une manœuvre pour maintenir une certaine opacité sur ses intentions réelles. Dans un contexte où la confiance envers les institutions reste fragile, cette sortie sera scrutée de près, tant par les acteurs politiques que par la population. Reste à savoir si cette promesse de privilégier la compétence se traduira par des actes concrets ou si elle restera un discours stratégique pour naviguer dans un paysage politique complexe.
