Romuald Wadagni est le dauphin de Patrice Talon. Au-delà de son profil personnel, son éventuelle accession au pouvoir pose déjà une question essentielle: Quelle sera la stratégie du Bénin face à l’Alliance des États du Sahel (l’AES) ?
Les équilibres régionaux se sont modifiés avec la création de l’Alliance des États du Sahel (l’AES). Le Bénin, longtemps perçu comme un carrefour économique stable, se retrouve face à des voisins en rupture avec la Cedeao et engagés dans une réorientation diplomatique vers de nouveaux partenaires. Cette recomposition impose au futur président béninois de trouver un équilibre entre coopération sécuritaire, échanges commerciaux et maintien des alliances traditionnelles. En clair, le Bénin doit régler la cruciale question du voisinage géopolitique de plus en plus complexe.
Des attentes à l’horizon…
Au nombre des attentes, Romuald Wadagni, s’il accède à la magistrature suprême, devra composer avec une menace grandissante : l’instabilité sahélienne. Pour cela, il doit réussir à renouer le contact avec l’Aes. En effet, face aux incursions de groupes armés liés à la crise du Sahel, dans ce contexte, la posture du Bénin vis-à-vis de l’Aes sera déterminante. Il faut privilégier une coopération pragmatique pour sécuriser les frontières, ou maintenir une distance au nom de la fidélité aux engagements de la Cedeao et aux partenariats internationaux existants. Avec l’Aes, les liens économiques doivent être une priorité pour Romuald Wadagni s’il gagne. Économiste chevronné, Wadagni sait que le Bénin est fortement dépendant du commerce transfrontalier. La question du corridor Cotonou-Niamey, vital pour le Niger, sera au cœur de cette équation. Or, les sanctions imposées aux pays de l’AES ont affecté les flux économiques régionaux. Le futur président devra définir une stratégie claire. Il s’agit de relancer les échanges commerciaux avec des voisins essentiels, tout en évitant d’entrer en contradiction avec les positions de la Cedeao et de ses principaux bailleurs. Il est manifeste qu’il y a une question fondamentale pour Wadagni. Celui-ci incarnera-t-il une continuité stricte de la ligne Talon ou osera-t-il un repositionnement stratégique avec l’Aes. Nul doute que le Bénin ne peut ignorer ses voisins de l’Aes, mais il ne peut non plus se couper de ses alliances traditionnelles. Si Wadagni accède à la Marina, il doit trouver le juste milieu pour un leadership régional. La gestion des relations avec l’Aes pourrait aussi devenir un révélateur du leadership de Romuald Wadagni sur la scène ouest-africaine. Entre pressions internationales, attentes nationales et aspirations des populations frontalières, il lui faudra démontrer sa capacité à concilier fermeté et ouverture. Sa réputation de technocrate devra alors s’élargir à une stature diplomatique et politique, capable d’anticiper les mutations régionales. Si le champion de la mouvance gagne, le Bénin doit naturellement choisir entre continuité et repositionnement.
La Rédaction